Régionalisation de l’immigration, comment et pourquoi ?
15 septembre 2024
Marjolaine Cloutier
Même si l’immigration se concentre encore majoritairement dans la région de Montréal, les chiffres démontrent que la régionalisation de l’immigration gagne du terrain : la part des personnes immigrantes (permanentes et non permanentes) recensées hors de l’île de Montréal était de 30 % en 2001, alors qu’elle s’élève à 44 % en 20211 . Si nous souhaitons que ces chiffres progressent encore, il faut continuer de rendre nos milieux de vie en région attrayants, mais aussi s’assurer de répondre aux besoins des personnes qui immigrent en région.
On a tendance à réduire la question de l’immigration, ces derniers temps, à des seuils ou encore à la capacité d’accueil de ces personnes dans les communautés, ce qui nuit très clairement au vivre ensemble. Et si nous arrêtions, ne serait-ce qu’un instant, de parler de l’immigration qu’en chiffres, qu’en termes de, trop ou pas assez, afin de parler davantage de milieux de vie et de travail, d’engagement, de relations humaines et enfin de prendre conscience de la richesse que peuvent apporter à nos communautés ces femmes, hommes et enfants à condition de les accueillir adéquatement et au-delà de la statistique.
Et si nous devenions visionnaires, l’espace d’un moment, afin de voir la plus-value d’une intégration réussie, au niveau économique, social ou encore culturel, pour le Québec. L’immigration est un indicateur puissant de la vitalité d’une société, encore faut-il se donner les moyens de faciliter cette réussite, par exemple, grâce à un accès à la francisation, aux services publics (trop souvent mal adaptés ou insuffisants), à un logement, une école, une garderie, etc. Et si nous tentions de transformer les défis précédemment énumérés en opportunités pour dynamiser nos territoires. Favoriser l’immigration en région, c’est aussi permettre à des milieux dévitalisés d’avoir un second souffle, de reprendre vie, malgré le vieillissement de la population.
Les 69 corporations de développement communautaire (CDC) réparties dans 15 régions du Québec sont des actrices incontournables en matière de développement social et communautaire dans leur milieu, à l’échelle de municipalités régionales de comté (MRC) ou d’arrondissements ou de quartiers en milieu urbain. Elles offrent des services directs aux organismes communautaires de leur territoire en plus de développer des projets structurants à vocation sociale en partenariat avec ces organismes, les membres de la communauté ainsi que l’ensemble des partenaires institutionnels, politiques et autres actrices et acteurs des milieux. Elles représentent plus de 2 700 organismes communautaires.
Ce serait difficile d’être plus ancrées sur le terrain, sur les besoins et enjeux des populations qu’elles ne le sont. Il est donc primordial lorsqu’il est question d’immigration, qu’elles soient consultées et partie prenante des réflexions et des solutions. Les organismes communautaires sont également un maillon essentiel pour faciliter l’intégration des personnes nouvellement arrivées et favoriser les relations interculturelles, encore faut-il qu’ils aient des leviers à leur disposition pour y parvenir. Pour une immigration structurante, harmonieuse et adaptée aux réalités des différents territoires, mais aussi aux besoins de ces populations, les solutions doivent émerger du terrain, se bâtir au local, avec les premières personnes concernées, et surtout avec des leviers appropriés.
En cette ère du raccourci et du titre choc, on entend trop souvent des discours de peur de l’autre qui ne se basent que sur des chiffres à qui l’ont peut faire dire un peu n’importe quoi et sur une méconnaissance de l’autre. Cela étant dit, la crise sociale qui se vit en ce moment partout au Québec et qui fragilise particulièrement les populations vulnérables, est un enjeu réel qu’on soit de souche ou de cœur, qu’on soit nouvel arrivant ou peuple fondateur.
Comme le dit si bien le vieux proverbe africain : « Seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin ».
À propos de la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC)
Regroupant 69 CDC et plus de 2 700 organismes communautaires, la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC) intervient dans une multitude de domaines, notamment la santé, l’éducation, l’emploi, la défense des droits ou encore l’environnement. Les CDC agissent en tant que leaders du développement social et communautaire dans leur milieu. Elles offrent des services directs aux organismes communautaires de leur territoire, en plus de développer des projets à vocation sociale en partenariat avec ces organismes, les citoyens, les municipalités et les gouvernements.
1Institut de la statistique du Québec. « Migrations internationales et interprovinciales » Faits saillants tirés du Bilan démographique du Québec. Éditions 2024. Consulté le 26 août 2024. https://statistique.quebec.ca/fr/produit/publication/migrations-internationales-interprovinciales-bilan-demographique.